La Convention citoyenne pour le climat (CCC) a réuni - entre octobre 2019 et juin 2020 - 150 citoyens tirés au sort pour travailler conjointement à la formulation de propositions de mesures et solutions à mobiliser pour répondre à l’urgence climatique dans le respect de la justice sociale. Exercice démocratique inédit, il a permis aux citoyens désignés de s’informer, consulter, interroger et débattre des solutions mobilisables pour répondre à l’objectif fixé par le gouvernement de réduire d’au moins 40 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 (par rapport à 1990) dans un esprit de justice sociale.
La CCC a publié en juin un ensemble de 149 propositions, détaillées dans un rapport accessible ici.
L’Association négaWatt a accueilli avec beaucoup d’intérêt l’analyse multisectorielle réalisée par la CCC, et les propositions de politiques et mesures détaillées qui en découlent. Plusieurs membres et porte-paroles ont été auditionnés dans le cadre des travaux des commissions sectorielles de la Convention.
Le Président de la République s’est engagé au lancement des travaux de la CCC à reprendre « sans filtre » les propositions formulées par les citoyens et à les présenter telles quelles au Parlement ou à référendum. Cet engagement est de plus en plus remis en question alors que le Président a annoncé plusieurs jokers lors de la présentation des propositions de la CCC, et que le gouvernement a d’ores et déjà écarté plusieurs propositions de la Convention depuis.
Une grande partie des propositions doivent désormais être transcrites dans un projet de loi dédié (Climat et résilience), présenté début février 2021 en Conseil des ministres. Certaines dispositions doivent aussi être portées dans le cadre du plan France Relance ou par voie règlementaire.
Si le projet de loi Climat et résilience a l’intérêt de présenter une approche multisectorielle et d’intégrer des premières mesures en matière de sobriété énergétique, celui-ci reste bien en-deçà du niveau d’ambition nécessaire à l’atteinte de l’objectif de réduction des émissions fixé à 2030, alors que celui-ci vient d’être relevé au niveau européen.
En effet, la plupart des mesures structurantes et des ensembles cohérents d’actions portés par la Convention citoyenne ont été écartés du projet de loi, ou modifiés de telle sorte que leur impact est fortement amoindri. Par ailleurs, certains équilibres proposés par la CCC entre action climatique et respect de la justice sociale n’ont pas été repris, et questionnent quant à l’acceptabilité de certaines mesures.
L’Association négaWatt se mobilise aux côtés d’autres acteurs pour assurer une meilleure transcription des propositions de la CCC dans le projet de loi, et formuler des propositions pour assurer la mise en place des conditions nécessaire à leur réussite. Dans ce cadre, l’Association est particulièrement mobilisée sur les volets rénovation et mobilités.
Rénovation
négaWatt s’est associée à une coalition d’acteurs économiques et associatifs pour demander la mise en place, dans le cadre de la loi Climat et résilience, d’une obligation de rénovation progressive, conditionnelle et assortie d’un dispositif d’accompagnement ambitieux.
Deux notes viennent compléter et préciser cette proposition collective :
Définir la rénovation performante, un enjeu majeur du projet de loi Climat et résilience - Février 2021
Pour une obligation conditionnelle de rénovation performante, progressive et bénéfique pour tous - Février 2021
Bilan au 4 mai 2021 – Volet Se loger
Après plusieurs mois d’intenses mobilisations de négaWatt aux côtés d’acteurs professionnels et associatifs en faveur d’une accélération du rythme de rénovation et d’une amélioration de la qualité des travaux ainsi que de l’accompagnement des ménages et de la filière, le vote en plénière à l’Assemblée nationale du volet Se loger du projet de loi ne peut que décevoir.
L’obligation de rénovation écartée
Le gouvernement a écarté les propositions d’amendement portées par les députés de la majorité et de l’opposition visant à inscrire dans la loi une obligation de rénovation progressive dans le temps. Un choix regrettable alors qu’une coalition exceptionnelle d’acteurs professionnels, financiers et associatifs s’est constituée autour du projet de loi pour porter dans le débat une proposition d’obligation conditionnelle de rénovation lors des mutations des maisons de classe F et G et des copropriétés lors des ravalements (lire la tribune à ce sujet). Ce mécanisme constructif propose un cadre d’action pour structurer des offres techniques, financières, et d’accompagnement des ménages fondées sur des retours d’expériences, afin d’accompagner structurellement l’interdiction en 2028 des passoires énergétiques.
Seule avancée du texte, la mise en place d’une interdiction de hausse des loyers des passoires en 2022, et l’interdiction progressive de location (par le relèvement du seuil décence) des classes G en 2025, F en 2028, et E en 2034. Ces dispositions ne s’appliquent cependant qu’aux logements en location et à condition que le locataire engage une procédure contre le propriétaire bailleur.
Pas de signal clair en faveur d’une stratégie sur les rénovations complètes et performantes
Alors que la Convention citoyenne demandait un changement clair de stratégie en faveur des rénovations globales (aussi appelées complètes et performantes), le texte voté à l’Assemblée ne donne pas de signal concret permettant de privilégier et de massifier ce type de rénovation.
Le texte définit une multiplicité de termes (rénovation performante, rénovation globale et rénovation complète) sans cohérence avec les critères utilisés ni les objectifs de la SNBC, ce qui rend difficilement lisible voire complètement incompréhensible la terminologie proposée. Pire, la définition de la rénovation performante portée par le rapporteur M. Nogal et votée en plénière vient dégrader le niveau d’ambition de la stratégie de rénovation nationale. Alors que la rénovation performante désignait jusqu’à présent des travaux permettant l’atteinte du niveau « Bâtiment Basse Consommation » (BBC) ou équivalent (soit l’étiquette A ou B du DPE), la définition dégrade cet objectif à la classe C.
Pas encore d’engagement clair sur les suites données à la mission Sichel
Le rapport Sichel a été rédigé par Olivier Sichel, directeur général délégué de la Caisse des dépôts, missionné par le gouvernement pour proposer des solutions permettant de faciliter le financement de la rénovation énergétique.
Le projet de loi intègre deux propositions de la mission Sichel mais sans en préciser la portée concrète ni donner de visibilité sur leur financement. Un dispositif d’accompagnement à la rénovation sera proposé pour certaines rénovations et pourra devenir progressivement obligatoire pour recevoir les aides à la rénovation MaPrimeRenov. Une garantie sur les prêts avance mutation finançant des travaux de rénovation pourra être apportée par l’Etat. négaWatt restera vigilante sur les travaux à venir qui devront préciser ces dispositifs à la fois d’un point de vue opérationnel et financier.
Mobilités
L’Association négaWatt porte depuis longtemps la mise en place de politiques complémentaires visant à réduire les émissions et les consommations dans le secteur des transports. Celles-ci s’appuient sur une politique de sobriété énergétique (maîtrise du trafic routier, évolution des modes de déplacements, limiter les dépendances aux prix des carburants et les externalités environnementales de certains modes de transports, etc.), sur une politique d’efficacité énergétique (réduction des consommations des véhicules), et une politique de conversion du parc vers des carburants décarbonés.
À découvrir
Deux notes précisant la proposition de rénovation progressive, conditionnelle et assortie :
Définir la rénovation performante, un enjeu majeur du projet de loi Climat et résilience Téléchargez la note
Pour une obligation conditionnelle de rénovation performante, progressive et bénéfique pour tous Téléchargez la note